« j’aime les hommes et alors ? ça ne m'empêchera pas de rapper » - jay boogie
Le MC américain originaire de République Dominicaine diffuse des rythmes ensorcelants, taillés pour résonner sur le parquet des dancefloors.
Jay porte un haut Calvin Luo. Harnais Bond Hardware.
Cet article a été initialement publié dans le n°350 d'i-D, The Sounding Off Issue, Hiver 2017.
Il est étrange que Jay Boogie ait à clamer sans cesse qu’il n’a « jamais voulu être rappeur » - alors qu’il incarne le hip-hop même. Enfant de Brooklyn, il a dû subir toute sa vie de multiples formes de discriminations, à chaque fois qu'il franchissait le pas de sa porte. « La vie dont on parle dans le hip-hop, c’est la vie que je vis », affirme celui qui excelle dans l’art de brouiller les genres et dont la dernière mixtape, Jesus Loves Me Too, est sortie cet été.
« Les tenues que je porte sont peut-être une manière de me féminiser, mais ça ne change rien. Parce qu’en fait, il me faut encore plus de courage qu'un gangster pour assumer ce que je suis. » Depuis quatre ans, Jay calibre des morceaux pour enflammer les pistes des clubs, en amenant une nouvelle saveur, une autre esthétique et un sacré culot dans l'industrie du hip-hop. Vous avez certainement déjà vu des rappeurs porter des robes, mais en connaissez-vous qui s’habillent de la même façon pour aller faire leurs courses que pour poser dans un magazine ? « Beaucoup d’aspects qui ont intégré la culture hip-hop ces derniers temps ont été infusés par des gens comme moi, avance Jay. Les mêmes choses se sont produites avec les plus grandes divas du R&B et les plus célèbres popstars. C’est le moment pour les rappeurs d’être à leur tour influencés par les vêtements que nous portons. »

Pour Jay, les problèmes surviennent lorsque les artistes enfilent des vêtements mais « n’assument aucune revendication ». Et d’après lui, la musique est une forme d’activisme, une façon de « parler à des gamins de l’Amérique moyenne qui ont 17, 18 ans, de leur dire ‘J'aime les hommes et alors ? Ça ne m'empêchera pas de faire du rap.’ » Dans le futur, il aimerait voir plus d’artistes LGBTQI+ briser l’hétéronormativité qui est de mise dans le monde du hip-hop. Et pour le moment ? « J’essaie juste de donner aux gens quelque chose de divertissant à regarder, quelque chose de fort à écouter et de leur transmettre un peu de courage. »
Il n’a peut-être pas choisi le rap, mais une chose est sûre : sa force est celle d'une arme de poing.

Crédits
Photographie Micaiah Carter
Coiffure et maquillage Wanthy.