la banlieue comme on ne la voit jamais à la télé
Originaire d'Aulnay-sous-Bois, le jeune photographe Marvin Bonheur revient avec nostalgie sur une banlieue dont la pensée ne l'a jamais vraiment quitté.
LA GLACE, Summer 2014, Marvin Bonheur
Malgré la veine douce amère de ses clichés argentiques, Marvin a bien Bonheur pour nom de famille. À seulement 25 ans, ce photographe originaire d'Aulnay-Sous-Bois vient d'être exposé à la Galerie L'imprimerie à Paris. Intitulée Alzheimer, sa série revient avec nostalgie sur une banlieue dont la pensée ne l'a jamais vraiment quitté. Graphiste de formation, Marvin a toujours été sensible à l'image. Au lycée, il se balade avec un appareil numérique et photographie ses amis « pour le loisir ». Mais très vite, l'appareil se révèle trop encombrant pour l'agitation urbaine qu'il cherche à capturer. En faisant l'acquisition d'un Olympus 35mm, Marvin tombe amoureux du rendu de l'argentique.
Enfant des 3000, élevé entre Aulnay-Sous-Bois et Aubervilliers, Marvin Bonheur vit à Paris depuis maintenant trois ans. En forme de retour sur sa propre histoire, sa série Alzheimer rassemble des clichés où l'ironie se mêle à la tendresse pour décrire les lieux qui l'ont vu grandir. « Le passé, c'est ce qui fait notre futur. Mais ces petits éléments semblent parfois tellement lointains qu'on a tendance à les effacer. Alzheimer, ça peut commencer par un simple oubli de prénom ! »
« L'eldorado », « Le bled », « La haine » - des titres de photographies qui jouent avec les stéréotypes et éprouvent la rigidité des représentations accolée à la banlieue : « Le langage c'est toute mon enfance : beaucoup d'expressions et beaucoup d'argot aussi. Ça aurait été contradictoire d'utiliser un langage moins urbain. Je crois que j'ai jamais réfléchi à un titre plus de 15 minutes. » « L'eldorado », c'est donc aussi le rêve des années 1980, les HLM flambant neufs, le faible taux de chômage et les promesses qu'incarnent ces barres de béton. « J'ai vu ces immeubles décliner, des familles très nombreuses se retrouver dans de minuscules appartements. L'eldorado, c'est le fait d'avoir vendu du rêve et d'avoir ensuite abandonné les gens. » « Mais la banlieue, c'est aussi de beaux moments » ajoute-t-il. En témoigne un cliché comme « La glace », où l'on découvre « un Noir et un Reubeu », réunis devant un camion pour s'acheter des glaces une après-midi d'été. « Le type d'images qu'on ne voit pas à la télévision. »

SADIO, hiver 2014, Marvin Bonheur

L'ELDORADO, été 2015, Marvin Bonheur

LA HAINE, été 2014, Marvin Bonheur

LE CHEMIN DE L'ÉCOLE, Marvin Bonheur
Credits
Texte : Marion Raynaud